Toutes les sociétés de productions de films publicitaires s’accordent sur ce point: le développement de talents est le cœur du métier de producteur. Dénicher les nouveaux talents, les développer et les imposer sur le marché a tout d’un long fleuve pas vraiment tranquille. Un parcours le plus souvent ardu où entrent en jeu non seulement le talent du réalisateur ou de la réalisatrice en herbe ainsi que le savoir-faire du producteur/productrice à hauteur de sa conviction et de son investissement, mais aussi l’intelligence des agences et des marques à faire confiance à un quasi inconnu ou débutant dans la réalisation de publicités… Et qui deviendra LE réalisateur ou LA réalisatrice qui compte.
Pour ne pas passer (trop longtemps) à côté du talent de demain, en ce début d’année où fleurissent pronostics et prédictions, Packshotmag a demandé à des productions quels sont leurs jeunes talents qui renouvelleront à coup sûr le marché publicitaire français en 2023.
Quels sont ces réalisateurs et ces réalisatrices qui émergeront en 2023 ?
Voici les sélections et les convictions de Dillinger, Loveboat, La Pac, DeGaulle, Eddy et Solab.
DILLINGER
« Les jeunes talents, j’adore», s’enthousiasme Alexis Bensa, le producteur fondateur de Dillinger. « Après 5 ou 6 ans dans les jurys des Young Directors Awards, je peux vous dire que c’est un sujet que j’affectionne particulièrement depuis de nombreuses années. C’est bien l’essence même de notre métier, de s’attacher à un artiste, à l’expression personnelle d’un réalisateur ou d’une réalisatrice, et de travailler à ses côtés pour connecter les deux mondes de la pub : l’art et le commerce.
James Cameron dit qu’aujourd’hui il y a presque 7 milliards de réalisateurs, chacun avec son iPhone et hop ! Oui, sauf que, ce n’est pas si évident ou facile de faire le tri ! En tant que producteurs, nous sommes les catalyseurs de toutes ces expressions individuelles pour trouver, embarquer, briefer, libérer, protéger ces instincts particuliers que nous allons chercher chez les jeunes talents, en fait tous les talents, mais chez les jeunes talents il y a ce petit truc en plus, un peu magique. Dans la publicité nous devons chercher des compétences diverses, que ce soit une direction artistique pointue ou originale, une manière créative de raconter les histoires, de fabriquer des émotions, du rire, des larmes. Des messages profonds et intelligents ou d’autres sans vraiment de fond mais une forme forte, bref il faut savoir lire les talents. »
Et de nous livrer sa petite technique toute personnelle de « lecture de talent » qui consiste en « une analyse triangulaire des instincts individuels et des compétences. Soit un angle du triangle pour la direction artistique, c’est-à-dire tous les aspects visuels et artistiques que le réalisateur aura coordonnés pour nous offrir le visible dans le film, un angle pour la maîtrise des comédiens, c’est-à-dire la faculté de nous présenter des caractères crédibles dans le film et son histoire, et un angle pour la manière de nous transporter dans l’histoire que l’on nous raconte, ou comment est écrit le film, avec quelle grammaire. Chaque réalisateur a son triangle !
Ce qui est passionnant pour nous, c’est d’avoir déjà regardé des milliers de films de tous les genres, des centaines de bandes de réalisateurs, et de vibrer encore pour une expression nouvelle, une manière étonnante, émouvante de nous toucher. Chez les jeunes talents, il y a cette expression intuitive qui se cache dans leur travail, et c’est particulièrement cela que nous cherchons, cet instinct à parler différemment d’un sujet, à le mettre en scène de façon marginale, individuelle.
Ces derniers temps les artistes qui me touchent et que j’ai sincèrement envie de voir se confronter à des films français dès maintenant sont les Coles, les Kronck, Kate McMullen, et Louis Julien Petit.
Le premier, The Coles est un duo californien, frère et sœur, qui pour moi fabrique un bon triangle isocèle! Ils marient intelligemment le visuel, le sens, le fond, la forme. J’aime leur qualité esthétique, leur sens de l’humour et la finesse de leur narration. Je les vois facilement sur des films d’idées.
Les Kronck est un couple allemand de réalisateurs qui aiment l’image, qui cherchent à bousculer les codes graphiques, l’humour, ou même la narration. Un vrai cocktail intéressant. Je les sens inventifs, ils vont loin dans le burlesque et je trouve qu’ils cherchent de manière intéressante à capter l’œil. Ils apportent une fraîcheur sur des idées assez simples, ils aiment pousser les ingrédients du film pour captiver ou surprendre, toujours au service de l’idée.
Kate McMullen est une réalisatrice anglaise qui aime la pub, les idées et faire des films. Son sens aigu des conventions la pousse à chercher et trouver une manière propre de raconter ses films. Elle est dans la vraie vie, dans le casting vrai, dans l’histoire vraie et drôle !
Louis Julien Petit, réalisateur de « comédie de fond », un mélange de genre assez unique dans ses longs – métrages que je rêve de voir s’appliquer dans la pub. Grand directeur d’acteurs et de non-acteurs, je l’imagine au service de marques qui veulent fabriquer des moments drôles, craftés et sincères. Un vrai réalisateur de comédie.
Leurs aventures dans la pub commencent ! Il leur faut les bons créatifs, ceux qui vont décrypter leur travail, leur donner leur chance, travailler avec eux pour les écouter et les accompagner. » Cependant regrette le producteur : « Le parcours est tendu et peut prendre du temps, car le milieu, les agences et les clients sont le plus souvent frileux à l’aventure du nouveau, du jamais vu. Petit paradoxe dans notre industrie ! »
The Coles, Les Kronk, Kate Mc Mullen, Louis Julien Petit
LOVEBOAT
Greg Panteix et Marine Garnier de Loveboat n’ont aucune hésitation : « Les talents qui émergeront en 2023 sont pour nous les talents qui auront leur propre univers et leur vision du monde. En 2022, nous avions mis la lumière sur Ludovic & Zoran Boukherma que nous avons fait apparaitre en publicité et que nous avons soutenus sur leur dernier long métrage.
Cette année, notre focus se porte sur deux réalisatrices aux univers très différents Amirah Tajdin et Alexane Andrieu.
La première, Amirah Tajdin, une jeune femme kenyane vivant à Dubai, est au cœur d’un mix culturel unique et elle développe un univers qui la positionne au carrefour de l’imagerie beauté / luxe et de la street culture. Amirah connait tous les codes qui font la publicité et les contenus d’aujourd’hui. Son profil est unique et dès notre première collaboration, elle a su nous séduire par son style, son originalité et son engagement. Nous sommes derrière Amirah depuis notre première rencontre avec elle. Nous développons son long métrage, et l’accompagnons sur des projets hybrides de Fashion Films. Nous sommes convaincus que son talent sera reconnu en 2023 sur le marché publicitaire français.
Alexane Andrieu vient juste d’arriver parmi les talents de Loveboat. Le visionnage de son court métrage « La Fleur de l’âge » pour Westfield a été un coup de cœur immédiat et notre rencontre avec elle dans la foulée également. Nous ne pouvions pas passer à côté de cette boule d’énergie et de talent qui en séduira beaucoup, c’est certain. Alexane vient d’une formation de comédienne car sa démarche était de connaître les acteurs avant de les diriger. Elle s’est ensuite lancée dans l’aventure de l’école Kourtrajmé en scénario et réalisation où elle réalise plusieurs courts métrages qui l’amènent à être repérée notamment par Pierre Lescure à l’occasion du Festival de Cannes 2021 pour participer à une masterclass. Cette passionnée travaille aujourd’hui à la préparation d’un nouveau court métrage inspiré de la BD à succès TMLP de Gilles Rochier, écrit sa propre série Plouc(s), et, parce qu’elle n’aime pas « rien faire » travaille en tant que scénariste au sein d’une room d’écriture pour une série médiévale commandée par Netflix.
Ces deux artistes ne sont pas une réponse évidente pour le marché publicitaire classique car elles bousculent les codes par leurs styles ou leurs trajectoires et c’est à nous producteurs de créer les passerelles, avec la confiance des agences et des marques pour prouver la légitimité de nos talents. Pour nous, les réalisatrices et réalisateurs qui ne se limitent pas juste à la publicité et se développent sur d’autres terrains sont la bonne réponse pour la publicité d’aujourd’hui et celle à venir.
Nous sommes profondément convaincus que des talents comme Amirah et Alexane sont là pour faire bouger les lignes. »
Amirah Tajdin, Alexane Andrieu
LA PAC
Jérôme Denis se montre tout aussi convaincu pour deux talents développés à La Pac, « Quentin Deronzier et Virgile Guinard qui vont faire 2023.
Le premier, Quentin Deronzier, a tout juste passé la trentaine et voilà 3 ans que l’on bosse avec Anna Roudaut et toute l’équipe de La Pac sur son développement. Des boulots perso produits chez lui à Annecy, homemade, qui ont développé sa communauté sur Instagram, et qui ont ouvert ensuite la porte de clips et de pubs, surtout à l’étranger dans un premier temps. Et depuis l’an passé, en mixant des productions de clips (Orelsan, Mia, The Weekend), du direct client (Balenciaga ou Louis Vuitton), nous avons trouvé la confiance des agences françaises. Avec deux campagnes signées Publicis Luxe à sortir cette année. Pendant tous ces mois, Quentin s’est constitué une équipe de techniciens fidèle et super talentueuse. Notamment en post-production. C’est aussi ça le développement, trouver sa famille de fabrication avec l’aide de son producteur.
Le deuxième talent, Virgile Guinard, est photographe. Il bosse pour Chanel et Jacquemus notamment. Je le rencontre via un vieil ami de maison de disques qui me demande si je veux bien produire son premier clip. Super rencontre, culture cinéma large et de choix, un premier clip abouti, très Hitchcokien et Lynchéen. Puis le deuxième clip. Virgile a de l’appétit, une grande élégance dans ses goûts, il aime les rapports créatifs et humains honnêtes. Avec Lola Idounda qui produit les clips pour Very-content, ils font une équipe d’enfer. Il faut toujours un couple prod-réal pour que les choses adviennent. Il réussit des films purs, hyper photographiques. Virgile, je le vois comme un nouveau Mondino. Référence absolue certes, mais je vois en Virgile la même envie, la même curiosité et liberté de penser. Je sais qu’il va aller loin. »
Quentin Deronzier, Virgile Guinard
DEGAULLE
Pour Edouard Bonnet, le producteur fondateur de DeGaulle : « Les deux talents qui nous tiennent tout particulièrement à cœur sont Manon Gaurin et Duper, parce qu’ils sont des personnages sans concession. Parce que c’est là tout le sujet du producteur : Savoir lire une identité, développer et faire vivre un réalisateur dans des univers qui lui correspondent, en respectant son ADN – aussi radical puisse-t-il être – sans concession.
Ce sont deux profils totalement différents, tant dans ce qu’ils font (quand bien même ils pourraient être liés par la « comédie ») que dans ce qu’ils sont. Deux approches qu’il faut appréhender différemment si on parle de développement.
Manon Gaurin a 26 ans quand on se rencontre fin 2020. Haute en couleurs, elle n’est pas du genre à peser ses mots. A cette époque, elle fait souvent de la déco sur nos films. Au fil des projets, nous apprenons à nous connaître et un jour elle vient me voir en me disant qu’elle réalise, que c’est ce qu’elle veut faire et qu’elle a déjà été à la baguette de plusieurs courts métrages qu’elle me présente. Evidemment, impossible de rester insensible à la justesse de sa direction. Elle ne connaît pas grand-chose de la publicité (aujourd’hui encore, elle rame avec tous les acronymes de notre métier) mais c’est ça qui m’intéresse, sa pureté, sa fraîcheur.
La pub est prête pour une réalisation aussi brute que juste et une réal capable de diriger des comédiens de cette manière a clairement quelque chose à y faire. Il faut alors arracher un premier projet pour la mettre sur les rails. Arrive la campagne Acadomia. Une campagne très challengeante niveau budget mais qui, si elle était bien pensée en amont, pouvait faire des étincelles. Nous vendons Manon sur la base de ses courts métrages, l’agence -Rosa- a l’intelligence de nous faire confiance et Manon rentre très vite dans le process créatif, participant à l’écriture, travaillant main dans la main avec les créatives. On en connaît le résultat.
Aujourd’hui Manon revient en Pub, aguerrie par 41 jours de tournage de deux saisons d’une série… qui était précisément sa référence quand on a remporté Acadomia! La boucle est bouclée. Elle fera incontestablement 2023.
DUPER (Romain Pergeaux), c’est une autre histoire. À l’inverse de Manon, il connaît tout de la pub. Ancien créatif (Buzzman, BETC, …), co -fondateur et directeur de création d’Artefact 3000, c’est comme ça que nous nous rencontrons. Pour la petite histoire et parce qu’elle est fondatrice, il est le premier à faire confiance à DeGaulle sur une campagne Heetch chez Buzzman en 2016. Finalement la confiance ne serait-elle pas la base de nos métiers ? Confiance dans le talent d’un réal, confiance dans le conseil du producteur, confiance dans la paire prod-réal. C’est un fou de concept et de fabrication qui, en mettant un stop net à sa carrière en agence et en choisissant la voie de la réalisation, souhaite revenir à ses premières amours : La bonne publicité, radicale, porteuse de concepts forts.
Nous produisons sa première campagne, sortie il y a quelques jours, pour Lustucru. Un film fou pour une marque Grande Conso, dont les multiples contraintes sont devenues source de créativité pour un réalisateur qui adore travailler dans ces conditions.
Entre son envie débordante de revenir à une création pure et entière et la légitimé qu’il tire de son passé, je crois sincèrement qu’il est au bon endroit, au bon moment. Et je suis ravi d’être là pour l’accompagner. »
EDDY
« Depuis 2014, Eddy permet à de jeunes réalisateurs d’émerger sur le marché de la publicité en les accompagnant sur l’écriture et le développement de leurs projets personnels », précise Alexandra Roussel, en charge du département Live qui vient de se renforcer avec l’arrivée récente des producteurs Hadrien Penavaire et Aubin Talbi. «Avec les deux autres départements Animation et Fiction, nous avons la possibilité de créer une passerelle pour des projets hybrides, mix media, courts métrages, longs formats, clips que nous développons, pour certains de nos réalisateurs qui le souhaitent. Cette possibilité de complémentarité fait partie de notre force et apporte une synergie créative.
Nous nous efforçons de rester audacieux et aventureux dans les choix de la famille de talents qui constitue notre roster. Créer une transversalité unique entre les mondes du Cinéma, de l’Art et de la Publicité, c’est ce qui nous anime plus que tout. Mais aussi, la volonté d’aller chercher des profils singuliers de talents créatifs guidés par l’envie de partager, de collaborer avec un producteur et de pousser la création dans son ensemble. Ce sont ces choix si spécifiques dans le recrutement de nos talents qui nous permettent d’aborder des projets publicitaires avec autant d’audace narrative et esthétique.
La particularité d’Eddy aussi, je pense, réside dans notre manière de collaborer entre producteurs. Nous travaillons étroitement ensemble et nous nous répartissons les projets, nous recherchons et choisissons les talents d’un commun accord, ce qui nous apporte une richesse et une force de propositions. Nous échangeons notre point de vue sur la manière de produire afin de réfléchir à de nouvelles formes qui répondent à l’évolution du marché. Avec les réalisateurs, nous nous efforçons au fil des projets de mieux nous connaître mutuellement pour optimiser le processus créatif de production.
Nous avons choisi de mettre en lumière des talents avec des identités visuelles uniques, capables d’apporter de nouvelles dimensions narratives : la réalisatrice Haya Waseem et les réalisateurs Grajper, Wacho, et Temple Caché.
Haya Waseem est une artiste pakistano-canadienne qui nous est très chère chez Eddy. Sa maîtrise de la narration mais surtout la facilité avec laquelle elle parvient à susciter des émotions en s’appropriant les scripts est un atout formidable. S’adaptant constamment à de nouveaux environnements et à de nouvelles personnes, Haya a développé un sens aigu de l’observation qu’elle intègre dans son travail. Sa sensibilité intuitive absorbe le courant sous-jacent d’un moment et le concentre dans des cadres singuliers, créant ainsi une expérience onirique et sensorielle.
Nous avons déjà développé Haya à travers trois films français depuis sa signature, et nous pensons qu’elle peut devenir l’une des figures de proue de sa génération. Une réalisatrice engagée, portant des signaux forts de diversité, de compréhension du monde et de justesse.
Grajper est un talent brut de la nouvelle génération de réalisateurs polonais. Autant dans ses projets personnels que commissionnés, son approche prend des formes novatrices combinant narration et art multimédia. C’est un réalisateur qui ne cesse d’expérimenter, les challenges techniques ne l’effraient pas ; au contraire, ça l’amuse. Mais loin de s’enfermer dans la pure esthétique, il a su amener une dimension intimiste et chaleureuse à ses films, incarnée par un casting diversifié et abordable. Au-delà de la forme, c’est un réalisateur qui comprend les problématiques d’un client, ses enjeux, et en faire une force pour le projet, un défi de plus. La direction qu’il pourra prendre dans le marché français est un enjeu qu’il nous paraît très intéressant de développer, d’autant que les agences sont de plus en plus sensibles à ce genre d’univers.
Le duo de réalisateurs argentins, Wacho, était un grand pari au moment de sa signature. Nous étions convaincus de leur originalité : l’expressivité de leurs personnages et la force de leurs compositions font de leurs films des chefs d’œuvres visuels. Nous avons donc beaucoup défendu leur travail auprès des agences qu’on a dû sensibiliser à leur style, dans une démarche de fond. L’année dernière, DDB est tombée sous leur charme et leur a proposé la nouvelle campagne pour l’édition 2023 du jeu vidéo Just Dance. Le client a même privilégié la director’s cut à la version initiale ! Nous avons eu beaucoup de retours positifs autour de nous, et ce projet annonce définitivement une belle percée de Wacho en Europe. Le duo apparaît déjà comme un incontournable de notre roster.
Temple Caché est un duo basé dans le sud de la France, formé par Marion Castéra et Kelzang Ravach, tous deux directeurs artistiques et réalisateurs. Formés à La Cambre en animation, ils ont commencé leur parcours en récupérant des images et vidéos sur internet pour développer une esthétique tout en collages qu’ils ont exploitée dans des clips, puis pour des marques telles que Tory Burch et Hermès. Une approche singulière du mix-media qui s’est naturellement imbriquée avec l’ADN Eddy et que nous souhaitons ardemment continuer à cultiver. Le duo cherche à être force de proposition avec également une réflexion globale sur tous les supports marketing de la campagne ; un plus pour les annonceurs aujourd’hui dont la communication ne se limite pas à la simple vidéo. 2023 sera l’occasion de pousser leur univers en prise de vue réelle pour mieux le déconstruire, grâce à la patte Temple Caché, en réinventant de nouveaux procédés, que ce soit en 2D ou 3D. »
Haya Waseem, Grajper, Wacho, Temple Caché
SOLAB
« L’ADN de Solab a toujours été depuis sa création lié à la recherche et à l’accompagnement de talents, aussi bien en clip, en fiction, que sur le marché publicitaire, en portant un soin tout particulier à la qualité de leurs productions », soulignent de concert les producteurs Edouard Chassaing, Nicolas Tiry et Baptiste Chassaing. «Romain Chassaing en est un bon exemple : en investissant du temps, de l’énergie et de l’argent sur ses premiers clips en stop motion comme ses dernières pub, il est aujourd’hui devenu un des meilleurs réalisateurs français.
Cet esprit aventurier et dénicheur de talents est confronté à plusieurs problématiques qui – même si elles ont toujours existé – sont devenues plus aiguës aujourd’hui. Le marché est tout d’abord hyper saturé et la concurrence s’est accrue entre les sociétés de production, mélange des « statutaires » créées au début des années 2000, celles qui ont émergé depuis 10 ans avec le virage digital comme Solab, et les plus récentes.
À cela s’ajoute une offre immense de talents ; la mise en scène étant devenue un médium accessible à tous, des talents émergent tous les jours des 4 coins de la planète pour tous types de supports, de formats, de destinations, … Ce qui est à la fois excitant et frustrant car il n’y a pas assez de place pour tout le monde, loin de là. Au final il y a plus d’offres que de demandes. Et combien de réalisateurs émergent par an ? Vraiment ? 1, 2, 3 grand maximum.
Dernier problème et pas des moindres : le développement de nouveaux talents se confronte aussi parfois à la frilosité d’un marché qui préférera choisir un réalisateur expérimenté plutôt que de parier sur un nouveau talent. Ce qui est un frein à l’émergence de réalisateurs, car ils ont besoin de la pub pour exister. Pourquoi ne pas laisser systématiquement une place à un(e) jeune réalisateur(trice) sur une compétition ? Pour l’aider à avancer, mais aussi nous laisser surprendre.
Nous avons à cœur de continuer à développer nos talents – à travers des films de commande et d’autres plus personnels ou non générateurs de profits – tout en restant à l’écoute des agences et des clients. Il s’agit d’une confiance réciproque, qui doit s’installer dans la durée. Face à cela, il nous faut étendre les champs de nos possibles en créant un éco système vertueux entre les différents départements chez Solab. De ce fait nous sommes passés de 3 à 6 producteurs l’année dernière. Stéphanie Savornin nous a rejoints au luxe, Evan Djenki en mode et au clip, épaulé par Sarah Gabay Réhel, Chloé Servel au cinéma et à la fiction TV, offrant ainsi à certains talents la possibilité de s’exprimer plus largement.
Solab a aujourd’hui envie de mettre en valeur deux talents, très différents et qui feront probablement l’actualité de demain.
Lana Senaoui est une réalisatrice égyptienne. Avant de passer derrière la caméra, Lana a été journaliste pour le New York Times et le Wall Street Journal pendant le printemps arabe avant de devenir créative en agence de pub. Elle a ainsi développé une détermination et une sensibilité toute particulière. Fortement influencée par le travail d’Alex Webb, Philip-Lorca diCorcia et Emmanuel Lubezki, l’approche visuelle de Lana est singulière, un mélange de plans très composés et de mouvements de caméra expérimentaux et libres qui se combinent pour raconter une histoire avec un point de vue personnel.
Lana débute sur le marché européen, et nous avons hâte de lui faire réaliser ses premiers pas en France.
L’autre talent qui nous semble refléter très bien notre temps est Builders Club, un duo formé par Jonas Hegi et Julien Simshauser. À l’heure des technologies hybrides, du metaverse, du tout digital, ce studio basé à Londres mixe habillement dans ses projets la prise de vues réelles, l’innovation 3D et la narration interactive. S’appuyant sur une équipe d’une trentaine de graphistes, d’un bureau R&D à New York et à Londres, les Builders Club collaborent régulièrement avec de grandes marques – Apple, Nike, Bulgari, Adidas, Samsung – et des agences à l’échelle internationale.
En France, nous pouvons ressentir un fort intérêt des agences et des annonceurs pour leur univers unique, et les Builders Club ont d’ores et déjà réalisé des films pour Chanel, Hermès, Tag Heuer et Helena Rubinstein ».
Certaines productions souhaitaient également mettre en avant des jeunes talents qu’elles développent, mais qui ont choisi en fin de compte de ne pas être liés par une exclusivité. Une tendance croissante à la liberté chez les jeunes réalisateurs dont s’agace un producteur « … ce nouveau courant des réalisateurs qui n’ont toujours pas compris qu’il leur faut un producteur plutôt qu’un film qui vient de partout ! »
La sélection de ces seize jeunes talents éclectiques plus que prometteurs à l’identité forte atteste sans aucun doute le rôle essentiel du producteur pour proposer le meilleur réalisateur possible sur un marché publicitaire en constante évolution.
Une nouvelle génération talentueuse de réalisateurs et réalisatrices que Packshotmag a hâte de retrouver cette année.